Valence l'association des sauvaginiers pour la biodiversité

« Les chasseurs naissent avec des bottes aux pieds ». Le ton est donné. Jean-Yves Lecoeur le clame haut et fort : la chasse, il est tombé dedans lorsqu'il était tout petit. « Je chasse réellement depuis que j'ai 16 ans, explique-t-il. Mais depuis des années et des années déjà, j'y allais en observateur. » À 33 ans, ce Bousignien pur souche partage son temps entre son job d'assistant expert comptable et sa passion. « Je consacre absolument tout mon temps libre aux zones humides », reconnaît-il. Une zone humide ? Il s'agit d'un terrain où l'eau est le principal facteur de contrôle du milieu naturel et de la faune et la flore qui y sont associées. Le réservoir d'accueil d'une biodiversité bien spécifique, en somme.
Le Marais de Bousignies en est un exemple. « Ce sont des régions qu'il faut absolument protéger, car elles sont en constante régression,ajoute Jean-Yves, en avançant d'un pas décidé dans les hautes herbes. Chaque année, environ 10 000 hectares disparaissent à cause de la pollution, de l'industrialisation, des drainages... » S'il est chasseur, le président de l'association des Sauvaginiers de la Vallée de la Scarpe n'en est pas moins un ardent protecteur de la nature.
Protection et éducation
« La chasse a mauvaise réputation. Les gens voient le chasseur comme un prédateur, fusil à la main, regrette-t-il. Ils ignorent souvent que nous participons à l'aménagement du territoire et à la préservation de la biodiversité. » Pour redorer leur blason et faire l'éducation des générations futures, certains chasseurs, comme Jean-Yves, organisent des partenariats avec les écoles. « Je contacte les directrices, on essaye de faire le lien avec le programme scolaire, et j'emmène les gosses sur les sites », détaille-t-il. Une façon pratique d'éveiller les élèves de primaire au respect de l'environnement.
Arrivée dans une zone boueuse : les bottes kaki déjà crottées de Jean-Yves ne craignent ni la gadoue, ni les dépressions inondées. Il avance, parfaitement à l'aise. Une nuée de mouettes survole le Marais. Dans le calme ambiant, des cris d'oiseaux retentissent, plus ou moins lointains. « Ah, ça, c'est une cane colvert ! s'exclame Jean-Yves, un sourire dans les yeux. Et ça une foulque ! » Les oiseaux, il connaît. « On les chasse, mais on les protège aussi, insiste Jean-Yves. On a des consignes à respecter, et de toute façon, le chasseur du XXIe siècle est obligé d'oeuvrer aussi pour la préservation de la nature. » Les consignes évoquées sont celles du réseau Natura 2000, un ensemble de directives européennes destinées à protéger la biodiversité. La démarche de Jean-Yves, à laquelle s'associent plusieurs acteurs régionaux comme le Parc naturel régional Scarpe-Escaut ou La Fédération Régionale des Chasseurs du Nord - Pas de Calais, tend à démontrer que chasse et préservation des milieux naturels sont compatibles.
La main d'oeuvre commence à arriver, au Marais de Bousignies : « Aujourd'hui, on s'occupe du nettoyage et du débardage ! », commente Jean-Yves. Demain, il passera la journée dans sa propriété, sa zone humide à lui. « Après des journées devant un écran d'ordinateur à pianoter, c'est le meilleur moyen de déstresser, confie-t-il. Je chasse, quand c'est la période. Mais il m'arrive très souvent d'y aller, juste pour marcher et profiter du calme. » Près d'un hectare et demi de terrain, à Tilloy-Lez-Marchiennes. Son sanctuaire.